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3. Nos belles -familles.

. Si lui, le bientôt fiancé, le futur comme l'on dit - ça fait drôle " fiancé " ça fait presque boule anti-mites - c'est Sébastien Villepou, ingénieur, moi c'est Jessie Cassegrain, étudiante en lettres.

Je ressasse. Mais mon Cassegrain à moi n'a rien avoir avec le Cassegrain des célèbres usines de fabrication de conserves nantaises de petits pois qui d'ailleurs n'existent plus. Je n'ai aucune parenté avec ces Cassegrain-là, ces gens-là. Je ne suis qu'une Cassegrain banale, un petit pois parmi des milliers d'autres. Mes aïeux ne reposent pas dans les somptueux caveaux du cimetière Miséricorde. Je suis une mademoiselle Dupont.
Dupont, fiancé, que de noms niais, noms niais …

Nos mamans et papas, des quinquas virant vers le sexagénariat travaillent. Mon père est directeur des ressources humaines au Leclerc Atout-Sud de Rézé-les-Nantes. Ma mère, elle, est chef du rayon boucherie dans la même grande surface. Il n'y a pas de sot métier. Elle pourrait avoir ses mains dans la farine eh bien non elle tripotait de la viande crue à longueur de journée, mon père lui disait: " Tu sens la viande, tu peux pas te choisir un autre parfum .. " Le pire c'est qu'elle s'aspergeait d'eau de cologne, un mélange à vomir. On le lui a dit mon père et moi, tu empestes, elle a dit qu'elle allait demander à changer de rayon. Mon père lui a dit: " C'est bien chérie, mais surtout pas le rayon fromage ! ". Elle a été promue chef du rayon Boucherie.

Alors tel un colonel de sapeur-pompier qui ne conduit plus les camions, comme elle est chef elle ne tripote plus, elle ne tripote plus les viandes crues. Mais quand on me questionne sur le métier de ma mère, je réponds qu'elle est chef du rayon Parfums aux Galeries Lafayette, ça fait plus classe, et puis une étudiante en Lettres n'est-elle pas programmée pour écrire des romans, inventer des histoires ? Alors je me fais la main. Je mens. Non, je fictionne.

Son père à Sébastien est chef du bureau des grands rassemblements à la mairie de Saint-Herblain. Sa mère est adjointe administrative au bureau de l’état-civil dans la même mairie.

Mes parents sont communistes jusqu'au bout des ongles. Mon arrière-grand-père maternel était métallurgiste aux Chantiers Dubigeon à Nantes, il assemblait les panneaux qui constituaient la coque des bateaux. Mon arrière- grand-mère était agent de service à la cantine des chantiers. Lors des manifs qui ont préfacé la disparition des chantiers en mille neuf-cent quatre-vint-sept mon grand-père a lancé des pavés sur les crs. Il racontait qu'un jour de manif s'il avait voulu il aurait pu en tuer un, ça le démangeait, il a lancé un pavé mais il s'est dégonflé, le pavé est tombé à côté du type. Mon grand-père maternel est mort il y a longtemps, et ma grand-mère maternelle Lucie est vivante, mais c'est une impossible, une insupportable et répulsive vieille dame. Je n'ai pas connu mes grands-parents paternels. Mes parents ont un vrai marteau et une vraie faucille accrochés au dessus de leur tête de lit. Parfois je me dis que ce serait bien qu'ils se décrochassent.

Ils n'aiment ni Hollande, ni Fabius, ni Sinclair, ni Montebourg, ne parlons pas de Sarko, ni de Liliane Bettencourt, ils veulent que le parti soit consolidé, et comptent sur Mélenchon. Ils disent qu'il y aura toujours des exploités. Ils disent que les communistes c'est comme le quatorze juillet, comme le onze novembre, ce sont respectivement des identités incontournables, des dates qui magnifient le peuple qui s'est sacrifié corps et âmes pour la France et il est hors de question pour eux que le onze novembre disparaisse dans un Mémorial day, la preuve qu'ils ont raison c'est qu'aujourd'hui des lycéens croient que les maréchaux Foch et Joffre " ont aidé la France lors de la seconde guerre mondiale " . Mes aïeux disaient que toutes les guerres et que tous les sacrifices ne se valent pas.

Les Villepou - eux leurs quatre parents sont morts alors que Sébastien étaient encore très jeune - ils ont au dessus de leur tête de lit une petit tableau de la Vierge à l'enfant Jésus avec derrière coincé contre la tapisserie un rameau de buis. A chaque repas ils disent le bénédicité et chantent à la grand-messe du dimanche Marie soyez reine, chez nous soyez la Madonne qu'on prie à genoux, qui prie et pardonne …

Les miens le dimanche à l'apéro et avant de passer à table ils chantent l'Internationale, poings levés devant les portraits de Staline, Trotsky, Lénine, Kroutchev, Mao tsé toung accrochés et alignés sur un mur de la salle à manger.

" Il n’est pas de sauveurs suprêmes, Ni Dieu, ni César, ni tribun, Producteurs sauvons-nous nous-mêmes ! Décrétons le salut commun ! Pour que le voleur rende gorge, Pour tirer l’esprit du cachot, Soufflons nous-mêmes notre forge, Battons le fer quand il est chaud ! ... "

Ambiances.

Et moi je baise avec des vieux et je suis à la colle avec un catho. S'ils savaient les uns et les autres.

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3 - Nos belles - familles

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